Terre de misère

S'en-fout-la-mort dort dans la pluie et la nuit dense. Le vent frappe les baraques, emporte des toits fragiles et offre au ciel en transe, le corps de gosses frileux et d'adultes qui parjurent dans la nuit mauvaise. Il y a souvent eu des morts lors de tels orages, dans le quartier: une vieille ou un enfant recroquevillé sous les tôles et les planches d'une baraque que le vent sauvage avait culbutée. Cette nuit aussi appelle la mort. Le temps est coléreux; chacun se terre chez soi; et ceux qui n'ont plus de gîte affrontent, dans la nuit enragée le froid, le vent méchant et l'eau qui gifle, pour aller frapper à une porte amie. Par-dessus le souffle enragé de l'orage, l'on entend des aboiements féroces de chiens, des cris de panique aussi et des ordres furieux. P 143

Lire Terre de misères, c'est se laisser porter par la maîtrise d'une écriture mature servie par la poésie d'une sensualité omniprésente, à fleur de mot, à fleur de page. Il faut suivre Tiburce Koffi dans les dédales de ce recueil de récits tragiques où la sincérité de l'auteur le partage à la vérité des personnages.